Vient de paraître : "Samuel Beckett lecteur de 'L'Etranger'"
Mon article "Samuel Beckett lecteur de L'Etranger" vient de paraître, en français, dans la dernière livraison de l'Irish Journal of French Studies. Il est accessible sur le site de l'éditeur en suivant ce lien.
Résumé en français:
Dans sa première partie, cet article reprend les méthodes propres à l'histoire littéraire afin d'établir, sur la base de données factuelles, que Samuel Beckett avait lu et appréciait L'Etranger d'Albert Camus. Mais, comme l'expose une seconde partie, cet intérêt qu'il porte au roman se traduit également dans l'écriture même de plusieurs scènes de Molloy, le premier roman de la trilogie que Samuel Beckett commence à rédiger en 1947, et qui l'occupera jusqu'en 1949. En menant en parallèle l'étude textuelle de certains passages de Molloy et de trois extraits de L'Etranger, l'incipit, la scène du meurtre, et le premier entretien avec le juge d'instruction, nous montrerons que l'oeuvre de Beckett comporte des choix lexicaux et syntaxiques ainsi que certains motifs qui lui ont été directement inspirés par le roman de Camus. Au fur et à mesure que se précisera la nature et la forme du dialogue entre les deux oeuvres, il apparaîtra que si celui s'est instauré, c'est parce que Beckett voyait dans L'Etranger un roman qui recoupait en partie ses propres choix esthétiques de l'immédiate après-guerre.
Abstract in English:
Beckett read Camus’ L’Etranger after WWII, at the beginning of 1946, as we know it thanks to a letter to George Reavey, in May 27th 1946, where he wrote: “Camus’s Etranger is not any longer [than my French story]. Try and read it, I think it is important” (The letters of Samuel Beckett. Volume II: 1941-1956, Cambridge University Press, 2011, p. 32). What I would like to show is how ‘important’ it was indeed for the yet unknown writer Samuel Beckett, by focusing on Molloy, the novel he was on the edge to write at this period.
First, I will show that Molloy is echoing French literary debates of the immediate post-war, with several punctual allusions, for example by referring to Sisyphus as a “théorie à la mode”, or to Sartre’s La Nausée (a book he read in the end of the 30s, before the war) and existentialism.
Second, concerning more specifically L’Etranger, I will focus:
on Molloy murder scene, when Moran kills a tramp without really willing it, a scene which is a pastiche of the murder committed by Meursault, as I will demonstrate it;
on Father Ambrose, a character which is a comic reincarnation of the Chaplain in the confession scene of L’Etranger, when Meursault is in prison;
on the two first pages of the novel, when Molloy is “in [his] mother’s room”, wondering if she is not died.
And, to conclude, I will show there are also echos of the “maman est morte” situation in two short novels Beckett wrote just before Molloy.
Keywords: ALBERT CAMUS; LITERARY AESTHETICS; LITERARY INFLUENCE; POST-1945 LITERATURE; SAMUEL BECKETT; TWENTIETH-CENTURY FRENCH NOVEL